Du 20 au 26 août 2023 : semaine géologique dans le massif des Écrins
Comme chaque année, la régionale de Nantes a organisé son traditionnel stage de fin août sous la conduite de Thibaud Simon-Labric du Centre de Géologie de l’Oisans. La destination : le parc des Écrins, une destination idéale par grand jour de canicule, avec pour débuter une rando géologique de 2 jours autour du massif du Combeynot.
Au programme du premier jour, depuis le sentier des crevasses jusqu’au refuge de l’Alpe de Villar d’Arène via le vallon de Valfourche, de la tectonique alpine afin de mettre en évidence le chevauchement du granite du Combeynot (un granite de 320 Ma environ) sur les schistes jurassiques. Mais au sein des terrains sédimentaires, on observe également en lien avec cette phase de chevauchement des écailles de trias (cargneulisé ou non) témoins d’une phase importante de cisaillement. Bref, une tectonique plus complexe que ce qu’il n’y paraît au premier regard. Mais grâce au ping-pong verbal entre « nos » 2 géologues : Thibaud et Jérôme Nomade de l’Université Grenoble Alpes tout devient compréhensible.
Merci à Martine Richardeau pour cette vidéo !
Le trajet du second jour de rando passant par le col d’Arsine et se poursuivant dans le vallon du Casset permet de revoir toute la géomorphologie glaciaire liée au glacier noir d’Arsine : un cirque glaciaire avec des parois culminant entre 3200 et 3600m d’altitude, des moraines (frontale, latérales et sous-glaciaire) grandioses du Petit Age Glaciaire, 2 lacs glaciaires, cours d’eau riche en farine glaciaire…
Au programme du troisième jour : botanique avec la Visite du Jardin botanique du Lautaret localisé à 2100m d’altitude, à un carrefour bioclimatique et à un carrefour géologique. Le Lautaret est en effet situé au passage du front pennique qui sépare du coté occidental la zone externe des Alpes et du côté oriental, la zone interne. A cette diversité géologique s’ajoute la confluence des conditions de pluviométrie et de température de ces 2 zones. Résultat, sur une relative petite surface, une biodiversité importante : 2000 variétés réparties sur 30km autour du Lautaret. Jérôme Forêt, responsable Recherche du jardin du Lautaret a pris le temps de nous présenter les différentes missions du Jardin : la pépinière, la zone expérimentale où des recherches en conditions semi-contrôlées sont réalisées sur les conséquences du changement climatique et/ou des pratiques humaines sur les plantes alpines.
Ensuite, sous la conduite de Benjamin Grange de l’association Gentiana, petite marche aux alentours du Galibier, pour découvrir la flore typique des crêtes calcaires et des combes à neige ainsi que leurs différentes adaptations morphologiques et physiologiques : forme en coussins et touffes, nanisme, richesse en anthocyanes, pilosité et cuticule épaisse, production d’antigels…
Quatrième jour, après une longue piste (8 km) aérienne et poussiéreuse, la récompense : le plateau d’Emparis, un site classé Natura 2000 à environ 2250m d’altitude, c’est-à-dire à la limite de l’étage subalpin et de l’étage alpin. Formé dans les sédiments synrifts jurassiques du bloc basculé des Grandes Rousses, le paysage est ouvert, grandiose, avec des alpages (troupeaux de bovins et d’ovins), des zones humides et fait face au massif de la Meije avec ses glaciers : la Meije, le Râteau, la Girose, les Deux Alpes … Tout simplement magnifique !
Dernière journée de stage à la découverte de la gestion du Parc national des Écrins (le 6ème plus grand de France) en compagnie de Jérôme Forêt, responsable de la Réserve Intégrale du Lauvitel, un espace naturel sans activité humaine. Dans ce haut lieu d’intérêt scientifique un ATBI (All Taxa Biodiversity Inventory) a été mis en place afin de déterminer la biodiversité complète du territoire. Toutes les données relatives au Lauvitel sont disponibles en ligne : https://www.ecrins-parcnational.fr/…/reserve-integrale…
Outre la réserve intégrale, le cœur du Parc national des Ecrins possède un petit joyau touristique : le lac du Lauvitel, non pas un lac glaciaire mais un lac d’éboulis daté d’il y a environ 4000 ans. En plus de ses eaux limpides propices à la baignade (les APBGistes l’ont testée !), l’originalité de ce lac de 64m de profondeur, est d’avoir un marnage de 20m par rapport à son niveau d’eau le plus bas de l’été (conséquences importantes pour les invertébrés vivant dans cette zone).
Des lieux d’intérêt scientifique remarquable et beaux à la fois, des intervenants de qualité très sympathiques et disponibles font que cette « semaine de pré-rentrée » alliant dénivelés sous les pieds et cogitation cérébrale fut une véritable réussite. Un grand merci à Thibaud Simon-Labric du CGO pour l’organisation de ce stage non seulement géologique mais aussi naturaliste.